UNICORN WARS de Alberto Vázquez
Un film d’animation espagnol pour adulte qui orchestre la guerre épique et psychédélique entre un bataillon d’oursons et des licornes ? Une chose est sûre : vous ne verrez pas ça tous les jours. Un drôle d’ovni, baroque et galvanisant, en salles ce 28 décembre.
Unicorn Wars se déroule à un moment indéterminé de l’histoire du monde, lorsqu’un peloton d’ours en peluche subit un entraînement militaire rigoureux qui doit faire d’eux les héros de la guerre ancestrale entre les oursons et les licornes. Alors qu’ils se préparent à leur mission, qui n’est autre qu’une opération de sauvetage risquée au cœur de la forêt magique, des tensions apparaissent au sein du groupe, marquées par le mépris latent que le charismatique ourson Azulín éprouve pour son frère Gordi. Au fur et à mesure que les oursons s’enfoncent dans la forêt pour affronter la réalité de la guerre, les paradoxes de la nature des êtres de Unicorn Wars se révèlent dans toute leur ampleur, tandis que l’aventure elle-même prend des accents monstrueux, délirants et violents.
L’horreur !
Alberto Vázquez s’éloigne du conte animalier classique, sans pour autant renier complètement les conventions du genre. En ce qui concerne la conception des personnages – et des décors qui les abritent –, il combine l’approche pure des animaux anthropomorphisés explorée dans ses courts métrages (Decorado et Bird Boy), puis dans son long métrage (Psiconautas), avec son travail autour de la représentation de figures mythologiques, plus proche du pictural. Finalement, ce qui impressionne surtout chez lui, c’est l’ampleur des registres et la polyvalence de son travail, qui repose sur une certaine idée du contraste, du conflit des idées et des expressions plastiques. Ici, le cinéaste espagnol continue d’approfondir son approche de la matière dont sont faits les mythes et les légendes, avec des jeux référentiels multiples, un ton discordant… Un cocktail détonnant.
Dès le prologue, une scène bucolique se mue, grâce à une utilisation sophistiquée des couleurs et du point de vue, en une vision de cauchemar mémorable. La force du film vient aussi du contraste entre, d’une part, la grande absurdité de la culture belliciste des oursons et, d’autre part, la dictature de la beauté et la rhétorique affective qui baigne les relations entre les personnages. Tout ceci dessine un monde dystopique où chaque aspect de la vie quotidienne – relations amoureuses, famille, identité, poids de la religion – atteint la limite du grotesque. Enfin, Alberto Vázquez imprime sa marque grâce à son habileté dans les ruptures de ton et de registre, passant de la comédie malaisante au mélodrame familial pour finir dans l’horreur pure – lorsque l’expédition dans la forêt prend des airs de voyage au cœur des ténèbres – et enfin à la fantaisie épique qui donne lieu aux plus belles images du film. À son paroxysme, Vázquez porte son récit de frères ennemis jusqu’à la tragédie grecque, dans un drame aux proportions bibliques devant lequel nous, spectateurs, ne pouvons que rester bouche bée ; comme ces hominidés qui, du haut des arbres, attendent leur tour d’hériter de la Terre après la disparition de la dernière licorne.