Francis Galluppi (Last Stop : Yuma County) : « On a tout fait péter, pour de vrai ! »
Au milieu du désert brûlant d’Arizona, une station-service se retrouve à sec. Lorsque deux braqueurs en cavale débarquent dans le diner attenant, la température monte encore d’un cran. Rencontre avec un cinéaste explosif.
Propos recueillis par Laurie-Anne Alfero.
The Last Stop in Yuma County est un (quasi) huis clos, dans un diner au milieu du désert. Quel rôle joue ce lieu dans l’histoire ?
Comme pour mes précédents courts métrages, c’est un lieu sur lequel je suis tombé par hasard qui est à l’origine de l’histoire. Bien qu’ayant grandi à Los Angeles, je voue un intérêt tout particulier à l’imaginaire américain, le désert et les diners. J’ai longtemps travaillé dans le monde de la musique, en tant que tourneur, j’ai un passif avec les enseignes en bord de route.
Quelles autres idées ont guidé votre écriture ?
Je suis quelqu’un de parano. Vous voyez ce sentiment d’arriver en retard à une soirée ? J’ai voulu retranscrire ces craintes à l’écran en glissant un homme bien sous tous rapports dans une situation délicate. J’avais envie de demander au public : ‘Que feriez-vous si vous vous retrouviez dans ce genre de situation ?’
Tourner en huis clos relevait-il du challenge ?
Nous étions comme des sardines en boîte, une chose est sûre, c’est que ça a resserré les liens. D’apparences, le set est très réaliste, tellement que nous avons dû repousser des automobilistes qui cherchaient à faire le plein d’essence, à plusieurs reprises. Mais on n’avait pas accès à l’électricité directe et besoin d’un camion-citerne pour l’eau, il a fallu s’organiser pour ne pas perdre de temps. Surtout qu’on était pressés d’arriver au moment de l’explosion.
Parlez-nous un peu de cette explosion ?
Oh, on a tout fait péter ! Pour tout le film, on l’a joué vieille école en n’utilisant aucun effet de synthèse : le petit oiseau qui l’ouvre et le ferme a été entrainé, les coups de feu sont des pétards ou des balles à blanc, et effectivement, on a fait exploser un putain de camion. C’était tellement énorme que je craignais qu’on mette le feu au désert, il était impensable que qui que ce soit en sorte vivant.
Malgré toutes les références aux westerns et aux films noirs, le film laisse beaucoup de place à l’humour.
J’ai présenté le projet aux acteurs comme une « comédie sombre », je voulais quelque chose de poussé à l’extrême, tellement que c’en deviendrait absurde. Quand Nick Logan (Travis) et Connor Paolo (Gavin) ont reçu la direction d’en faire « plus », ils l’ont fait de la meilleure manière possible. Plus on jouait les scènes, plus l’histoire est devenue loufoque. Les acteurs et actrices ont élevé l’écriture grâce à leur jeu.

Qu’est-ce que c’est que cette histoire de la tarte à la rhubarbe ?
Certains détails s’adressent directement à mes proches ou résonnent avec mon histoire personnelle. Quand j’étais petit, ma mère adorait faire des tartes à la rhubarbe, je faisais des mots croisés avec ma grand-mère, nous avions aussi sans arrêts des vendeurs de couteaux à la porte, Midnight train to Georgia, que l’on entend dans le film, est aussi la chanson préférée de ma femme. Certains se sentent concernés, d’autres se questionnent : pour le spectateur, c’est comme un deuxième niveau de lecture.
Une scène semble construite autour de la musique, comme dans un clip vidéo, comment l’avez-vous dirigée ?
C’est une scène qui sort du lot, avec de la musique à fond, des ralentis et des plans très courts. J’ai beaucoup douté, les gens ne comprenaient pas pourquoi je mettais un clip au milieu du film. Mais j’ai eu raison de m’accrocher à cette chose bizarre, le résultat est carrément à la hauteur. Dieu merci ça a marché, et dieu merci nous avons eu les droits pour Roy Orbison, ça ne pouvait que marcher avec ce titre.
Last Stop : Yuma County, en salles le 6 août.