DOWN WITH THE KING : rencontre avec Freddie Gibbs

Après l’immense succès de son album Alfredo – sans doute son chef-d’œuvre – le prolifique rappeur U.S. Freddie Gibbs enfile le manteau de fourrure et les claquettes-chaussettes d’un rappeur en proie au doute dans le très bon Down with the King (qui sort exclusivement en VOD le 12 septembre). Rencontre avec le rappeur, qui se verrait bien devenir un habitué des plateaux.

Qui aurait pu imaginer un rappeur de votre trempe débuter sa carrière d’acteur sur un film d’auteur indépendant ? 
Cela fait longtemps que j’avais envie de faire du cinéma, peut-être aussi longtemps que mon envie de rapper, mais je ne voulais pas commencer par des gros films d’action ou n’importe quoi. Puis Diego Ongaro (le réalisateur de Down with the King) est arrivé avec une proposition de film d’auteur qui me correspondait vraiment, sur laquelle je savais que j’allais me dépasser. Il y a quelques années, j’avais aussi passé des auditions pour Inherent Vice (de Paul Thomas Anderson) mais c’est Michael K. Williams qui a eu le rôle. Je n’étais pas encore assez affûté. Aujourd’hui je me sens prêt, capable de rivaliser avec n’importe quel acteur. Comme dans le rap.

Étiez-vous tout de même intimidé les premiers jours de tournage ? 
Bien-sûr ! Après avoir reçu le script, j’ai commencé par travailler le rôle pendant 6 mois et arrivé sur le tournage, Jamie Neumann (sa partenaire à l’écran) m’a aidé à me contrôler, à affiner mon jeu d’acteur. Diego Ongaro aussi m’a beaucoup accompagné, il a été comme un mentor pour moi. Il m’a laissé beaucoup de libertés, je crois que j’étais là pour ça. Les gens pensent que c’était facile pour moi d’incarner un rappeur, mais je ne voulais pas jouer mon propre rôle. Fatalement, on a pas mal de points communs, notre façon de rapper, notre foi, mais je voulais aussi creuser une autre personnalité de rappeur. Typiquement, les moments tristes étaient les plus durs à jouer. 

Comme votre personnage de Money Merc, avez- vous déjà pensé à tout arrêter ? 
Du plus loin que je me souvienne, je n’ai jamais pensé à arrêter, même si il y a tout un tas de choses qui rendent le rap game difficile à vivre. J’ai peut-être déjà déconné à propos de ma retraite mais pourquoi j’arrêterais de rapper ? Je fais partie des meilleurs rappeurs au monde, il n’y aucun doute là-dessus et je n’ai pas peur de le dire, ni de le faire savoir. 

Money Merc raconte “qu’il a fait du rap pour sortir de la rue, mais que tout dans la rap le ramène à la rue”, vous partagez ? 
Complètement. La rue fait partie du rap. J’ai des anciens amis qui sont devenus si jaloux qu’ils ont essayé de me tuer (ndlr : le rappeur a été la cible d’une fusillade à Brooklyn en novembre 2014) . Et il n’y avait pas d’histoire de drogue ou de guerre des gangs derrière, ils étaient simplement jaloux à cause du rap, parce que j’ai plus percé qu’eux. C’est complètement dingue. Franchement, cela n’arrive que dans le rap, vous avez déjà vu des chanteurs de pop ou de country s’entretuer ? 

Vous avez récemment confié avoir créé des faux comptes Instagram pour clasher les autres rappeurs, c’est vrai ? 
Oui c’est vrai. Mais ils n’arrêtent pas de fermer mes comptes. J’ai une très mauvaise relation avec les équipes d’Instagram. Ils disent que je suis un emmerdeur, parce que je ne peux pas m’empêcher de narguer et d’intimider les autres rappeurs. Mais ça fait partie du rap, c’est le genre musical le plus compétitif et c’est aussi pour ça qu’il y a autant d’embrouilles dans le milieu. Comme je suis un compétiteur, au top dans l’industrie, je ne me refuse rien, je pense que je pourrais clasher n’importe qui. 

D’autres rappeurs sont passés de la musique au cinéma : Ice Cube, Will Smith, Tupac… à quel point vous ont-ils inspiré ? 
J’ai envie d’envoyer des fleurs à ces types pour avoir ouvert le chemin, je me souhaite d’avoir la même réussite que des rappeurs comme Common Sense ou Mos Def. Je suis prêt à me surpasser si on continue à m’offrir des premiers rôles ! Tupac également… parti trop tôt, alors qu’il était en train de devenir un grand acteur. Et Ice-T. Jouer un flic badass à la Ice-T dans New Jack City, ça surprendrait tout le monde, non ?