IRMA VEP : rencontre avec Devon Ross
Son teint d’albâtre et ses yeux de biche contrastent avec sa coiffure punk et son indolence très New Wave. Coincée entre le Londres des Swinging Sixties et le Paris de la Nouvelle Vague, Devon Ross exhibe sa drôle de frimousse dans Irma Vep, relecture sérielle franchement réussie d’une bobine éponyme – et un peu oubliée, soyons francs – du frenchie Olivier Assayas (la série est à découvrir sur OCS à partir du 7 juin). Mannequin, guitariste, songwriter : la jeune femme qui a bourlingué entre Los Angeles, Paris et Londres obtient cette année son premier rôle hors des podiums, celle d’une assistante cinéphile aux petits soins pour Mira (Alicia Vikander), actrice américaine venue tourner à Paris le remake des Vampires de Louis Feuillade sous la direction d’un réalisateur un brin sociopathe campé par l’inénarrable Vincent Macaigne. De passage à Cannes, Devon Ross nous a invité à trinquer au Perrier dans une suite du Majestic. Confidences ferrugineuses.
Olivier Assayas vous offre votre premier rôle dans une série. Comment votre expérience dans le mannequinat vous a-t-elle aidée ?
Quand je fais du mannequinat, j’essaie toujours de donner à voir un personnage. Ça me permet de rentre mon travail intéressant et de lui donner un sens. Passer devant une caméra n’a rien de nouveau pour moi, mais je n’avais jamais eu des dialogues à apprendre. Au début, me retrouver avec Oliver (Assayas) était plutôt intimidant. J’ai eu la chance de travailler avec une équipe bienveillante qui ne m’a pas fait sentir que c’était ma « première fois ». J’étais logée à la même enseigne que tout le monde.
Vous avez passé une partie de votre enfance à Paris. C’était un retour aux sources ?
Je viens souvent à Paris pour le travail, pas plus d’un ou deux jours. J’essaie de prendre le temps de me perdre dans les rues du Marais et de passer dans mon restaurant préféré, Chez Janou. Vivre à Paris pendant cinq mois a nourri mon travail d’actrice. Je n’y étais jamais restée aussi longtemps. Irma Vep est également une déclaration d’amour au cinéma. On voit une équipe en train de tourner un long-métrage avec des caméras, une équipe technique, etc. C’est ce décor qui sert de cadre au « film dans la série ». L’expérience a donc été immersive à plusieurs niveaux.
Comment avez-vous travaillé avec Olivier Assayas et Alicia Vikander ?
Olivier accorde beaucoup d’importance au moindre détail et donne à tout le monde la liberté de collaborer avec lui. Il aime particulièrement chorégraphier chaque scène pour la rendre plus cinématographique. Irma Vep me fait plus penser à un très long film qu’à une série télévisée, d’ailleurs. J’ai eu aussi la chance d’apprendre beaucoup grâce à Alicia, en jouant avec elle et en l’observant. J’avais l’impression d’avancer à l’aveugle en plateau et elle m’a aidé à trouver mes repères.
Olivier Assayas accorde souvent une grande place aux musiciens dans ses films. Vous êtes guitariste. Cette passion commune a dû vous rapprocher ?
La première fois que nous nous sommes rencontrés, Olivier m’a parlé du Londres des années 70 qu’il a bien connu. J’étais impressionnée : c’était « LA » bonne époque pour y vivre (Devon Ross vit actuellement à Londres, ndlr). Il m’a raconté des anecdotes pendant des heures : son passage chez Oz (un magazine anglais consacré à la contre-culture à la fin des années 60, ndlr), ses souvenirs d’un concert des Stones, etc. Je n’arrêtais pas de lui répéter : « Mon Dieu, c’est trop cool ! ».
Votre bagage musical vous a-t-il aidé pour tourner Irma Vep ?
La vie de Regina, le personnage que j’incarne dans la série, tourne entièrement autour du cinéma. Ma passion pour la musique m’a aidé à trouver cette même intensité dans son rapport presque obsessionnel aux films. Enfant, je regardais en boucle les films des Beatles : Magical Mystery Tour, Help!, Yellow Submarine. A l’adolescence, je me suis découvert une passion pour le cinéma de Sofia Coppola, surtout Virgin Suicide et Marie-Antoinette. Cette année, j’aimerais beaucoup voir le documentaire Moonage Daydream sur David Bowie !